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7/12/2015

#7CR Carnets de retraite : L'indécence de l'intime : Il y aurait une indécence à parler de son bonheur, une insolence impardonnable...

L'indécence de l'intime

Il y aurait une indécence à parler de son bonheur, une insolence impardonnable.

Il faudrait se morfondre du malheur en permanence, jusqu'à en perdre sa valeur.

Il y aurait une injonction au malheur, au partage du malheur.

Il faudrait ruminer à toute heure.

Eh, quoi ?

Le monde irait-il mieux si tu allais plus mal ?

Le bonheur d'être ne fait pas de toi un être immonde, sans moralité, ni conscience.

Il fait de toi un être debout, aux aguets des mouvements du monde, de ses réveils, de ses torpeurs moites et sordides.

Tu veux changer le monde ?

Change ton regard sur toi-même. 

Aime.

Aime vraiment.

Commence par toi.

Rejette l'habitude prise du mépris de l'autre, de la méprise narcissique.

Soumets-toi à la "méprise créatrice*". 

Il y aurait une injonction au partage du malheur.

Et si... ?

Et si tu remplaçais l'injonction généralisée au malheur par l'injonction au bonheur, changerais-tu le monde ?

Non.

Tu remplacerais une injonction par une autre. 

Change ton impératif. Présent.

Reviens sur le mode conditionnel. Présent.

Et si tu aimais ? 

Tu aimerais. Tu aimerais vraiment. 

Tu commencerais par toi. Petit à petit, tu perdrais l’habitude que tu avais acquise de mépriser tout ce, et tous ceux, qui ne pensent pas comme toi. Tu chercherais à les comprendre, à comprendre ce qui les anime. Pas pour les aimer, pas pour les pardonner. Juste pour les comprendre. Pour comprendre qu'ils sont humains, comme toi.

Et si tu te posais de bonnes questions ? Les tiennes. Les tiennes propres. 
Qu'y a-t-il qui ne va pas chez toi, que l'on pourrait critiquer de toi ? 

Et si tu cessais de te pardonner tout le temps et que tu t'interroges vraiment ?

Vraiment ?

Vraiment.

Comprendrais-tu le mépris de l'autre qui parfois te touche et te blesse ?

Oui.

 Té mépriserais-tu ?

Non.

Accepterais-tu d'être humain, d'avoir des failles, de ne pas toujours être l'être parfait que tu te rêves être ?

Oui.

Tu accèderais à l'humilité, le nez sur l'humus de la terre. C'est ce que veut dire ce mot. Humilité. Humus. Terre.

Et si tu te faisais le chantre de l'humilité, que ferais-tu encore ?

Rien.

Tu ne ferais rien de plus, rien de mieux.

Sinon t'agrandir encore sous tes propres yeux, aux yeux du monde.

Peut-être serais-tu plus heureux ?

Non.  

Pas mieux.

Tu poursuivrais ton "hubris", ta folie des grandeurs qui n'est pas la tienne propre, mais celle de ton ère, de ton aire.

Tu te donnerais la possibilité de penser en dehors de la "Passion de la Grandeur" de ton ère, de ton aire. 

La Passion de la Grandeur. Vieil héritage rance du monde des Maîtres dominateurs.

Tu n'aurais pas besoin d'être grand. Tu reconnaîtrais que tu es petit. 

Tout petit. 

Minuscule. 

A l'échelle du monde.
Une fois cette croyance acquise, tu serais prêt à changer le monde. par ta douceur. Sans rancœur et sans haine, délivré du mépris, de l'Autre, de Toi. Prêt à accompagner le monde, dans le monde, présent au monde, à l'Autre et à Toi.

Eh quoi ?
Cela ferait de toi un vainqueur ?

Oui.
Un vainqueur sur toi-même. Pas sur l'Autre.

Tu en aurais fait, du chemin, au monde. 

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*Note sur La Méprise créatrice : Crédit à venir, source oubliée. Peut-être Rancière (ou Barthes ?).

© Simone Rinzler | 12 juillet 2015 - Tous droits réservés

Tu penserais au conditionnel. 
Présent. 
Tu rejetterais l'impératif. 
Présent. 
Tu t'interrogerais. 
Présent.
Au monde.
Continûment. 
A L'Atelier de L'Espère-Luette

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