"Le Dernier Gardien d'Ellis Island" de Gaëlle Josse : un livre à découvrir
Je l'ai souvent retrouvée en littérature. Avec Georges Perec, bien sûr. Et puis, dans de nombreux documentaires, le plus souvent sur Arte ou sur la 3.
Je l'ai visitée aussi, le coeur serré par un chagrin indicible.
Mes grands-parents paternels n'avaient pu faire le chemin jusque là. Le numerus clausus avait frappé. On n'accueillait plus les étrangers, question de quotas.
[On se réfèrera au très drôle "Fuck America" d'Edgar Hilsenrath pour comprendre la difficulté à obtenir l'autorisation d'aller émigrer aux États-Unis.]
Alors, ma famille paternelle s'est installée en France, mon père a rencontré ma mère quelques années après la guerre, et je suis née.
Ni de là-bas, ni vraiment complètement d'ici, j'ai par la suite fait des études d'anglais. Je gardais un attachement pour cette île rêvée que mes grands-parents, mon père et sa sœur n'ont jamais pu atteindre. S'ils l'avaient pu, je ne serais pas là, avec cet attachement ineffable, sans raison apparente.
Mais il n'est pas besoin de raison pour expliquer un attachement à ce qui n'a pas été.
Je suis irrémédiablement attachée à Ellis Island.
Il y a quelques temps, j'ai vu que paraissait le dernier livre de Gaëlle Josse, auteur que je ne connaissais pas, et tout de suite, mon intérêt a été éveillé par le résumé du livre.
Alors que le centre d'accueil d'Ellis Island doit fermer ses portes, celui qui en fut le dernier gardien, écrit les mémoires de sa vie là-bas, sa vie avec sa première femme, décédée, son histoire avec une immigrante dont le petit frère, simplet et malade, ne peut débarquer à Manhattan.
Le hasard de l'ordre des lectures a fait le reste. Je venais de voir le film "The Immigrant" de James Gray, avec Marion Cotillard dans le rôle principal.
Les scènes du roman dans le livre de Gaëlle Josse font écho au film qui m'a servi de toile de fond. Les histoires, bien que différentes, disent toutes les deux la même détresse, le même attachement à la sœur ou au frère malade.
Cependant, dans "Le Dernier Gardien d'Ellis Island", tout se passe sur l'île. L'atmosphère d'étouffement et de peur est bien rendue. L'histoire du gardien force à une belle réflexion sur le rôle des gardiens d'état et mènent le lecteur à penser à ce que la notion de "devoir accompli" pour le compte d'un État peut avoir de déshumanisant.
Je conseille aux lecteurs de ne pas lire le résumé de la quatrième page de couverture ou certaines critiques que j'avais lues ailleurs sur le web.
La découverte de ce beau roman mérite une approche tout en douceur.
Je n'ai pas pu lire d'autre livre pendant quelques jours après la lecture de celui-ci, preuve que bien après la lecture, il résonnait encore en moi.
Une belle lecture, facile, agréable, dans un style limpide qui, de mon point de vue, convient tout autant aux grands lecteurs qu'à ceux qui lisent peu, ce qui, pour moi, est une grande qualité littéraire.
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