- Tu ne veux vraiment pas nous dire ce que tu fais entre Deux Petits Riens ?
- Ah ! Mais... Tu es bien curieuse !... Mais c'est qu'il n'y a Rien. Rien pour Toi, ni Toi, ni Toi. Rien qui ne mérite de sortir de là, de chez moi. Mais alors, franchement Rien De Rien.
- Vraiment Rien ?
- Qui te concerne ? Non. Rien. Inutile d'insister, tu n'arriveras à Rien et tu ne te fais pas du bien. Pourquoi cela t'intéresse-t-il autant de chercher à savoir ? Il n'y a pas de secret, tu sais. Juste Rien de très interessant pour toi.
Ah ! Je vois bien !
Moins je t'en dis et plus tu veux savoir, c'est ça ?
Ça t'intrigue et tu te racontes des histoires, hein ?
Tu crois qu'il y a de gros secrets, des histoires cachées, et tout ça ?
Et bien tu as raison, tiens ! Cherche donc, ça me fera du repos, pendant ce temps. Et ça me laissera le temps de ranger Mes Petits Riens. C'est qu'à force, j'en ai tout plein, et je ne sais plus où les mettre.
Tiens, pas plus tard qu'hier, j'étais encore en train de faire du tri dans Mes Petits Riens. Il y en a un qui commence à être très ancien et que j'avais complètement oublié. Et voilà qu'il me revient alors que je jette un œil par la fenêtre. Je constate qu'il n'y a que des bourgeons sur mon cerisier et que le printemps est plus tardif que l'an passé.
Et voilà que s'impose à moi cette sensation oubliée d'Un Petit Rien Évanoui.
Moi, marchant seule, à Washington, sous des cerisiers en fleurs. Un bonheur inouï.
Me vient alors une violente envie de fleurs de cerisiers, de rêves de Japon. Je chasse l'idée.
Ce n'est pas Un Petit Rien, c'est un souvenir qui m'est revenu à cause d'une fonction du Grand Réseau Bleu Moche De Chez Moche qui montre aux curieux ce qu'ils postaient ou aimaient à la même date il y a un, deux ou trois ans. Le cerisier était en fleurs l'an passé au début d'avril. J'ai vu cela il y a un ou deux jours déjà.
Mais ce voyage à Washington remonte à plusieurs dizaines d'années !
Pourtant, je ne peux m'empêcher d'y repenser. Ni d'aller jeter un coup d'œil à mon cerisier encore endormi. Cette vision, ce rappel de cette sensation, est-ce Un Petit Rien, ou bien ? Quoi ? Un souvenir heureux ? Un artefact mémoriel causé par un programme informatique ?
Peut-être bien un peu de tout cela. Un souvenir causé par une fonctionnalité que je n'avais que peu utilisé, préférant privilégier le présent et l'avenir au passé.
Une Mémoire De Petit Rien, peut-être.
Mais cette mémoire, vivace, qui me poursuit au point que je dois résister à aller piocher dans les clichés rangés à la cave, qui me revient plusieurs fois dans la journée n'est pas Un Petit Rien. C'est une petite nostalgie qui s'installe, sur laquelle on peut s'arrêter un instant, le temps de projeter de tourner un jour à Washington ou de découvrir le Japon, un jour, aux alentours de Pâques.
Le souvenir est agréable, tenace.
Mais ce n'est en Rien un Petit Rien.
Le Petit Rien, c'est au présent qu'il fait du bien. Quand il est là. Tout frais. Tout nouveau. Tout neuf. Un Petit Rien, ce n'est pas du réchauffé. C'est du bonheur instantané, sur l'instant, comme cette photo reçue aujourd'hui d'une jolie famille joyeuse, au soleil d'avril, dans un square du Champ de Mars, tout près de la Tour Eiffel. Tu n'y étais pas. Ce que tu as vu t'a fait du bien.
C'est Un Tout Petit Rien de Rien.
Du reste, tu ne sauras Rien De Plus, curieuse ! Je ne t'en dirai pas davantage.
Et d'abord, pourquoi tu ne t'es pas encore mise à La Pêche Aux Petits Riens, Aux Tiens ? Il suffit d'essayer tu sais. Même avec un mauvais matériel au début. Peu importe que tu utilises une vieille canne à pêche ou un filet à papillons tout mité.
Le tout, c'est de trouver un endroit où les mettre, pour les garder un peu.
Ça fait tant de bien, La Pêche Aux Petits Riens. Tu devrais essayer, tu sais, au lieu de chercher des secrets inexistants.
Bon, en attendant, demain, j'essaie d'attaquer vraiment Le Grand Tri des Anciens Petits Riens Qui Ne Servent Plus À Rien, si je ne veux pas succomber sous le poids de l'accumulation de Petits Riens.
Pour l'instant, je n'arrive encore à Rien De Bien.
Jeter. Jeter. Jeter.
Pour continuer.
Faire de la place Aux Nouveaux Petits Riens.
Ne pas s'encombrer.
Voyager léger.
Car c'est bien joli, tout ça, mais Trop De Petits Riens Tuent Le Petit Rien.
On ne s'y retrouve plus bien.
Bon, ce n'est pas le tout. Ce n'est pas l'heure des Petits Riens. Il est temps de se rendormir.
Allez !
Au lit !
Et à demain !
Si vous le voulez bien !
Toi, ça ne te dis Rien, mais moi, ça me fait sourire, tiens !
© Simone Rinzler | 11 avril 2016 - Tous droits réservés
Les Souvenirs Heureux s'incrustent dans Les Petits Riens À L'Atelier de L'Espère-Luette
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